Pour les théoriciens de l’Antiquité, le nombre est une collection d’unités. Cette définition découle de la notion de quantité dont Aristote dit qu’elle est « ce qui est divisible par deux ou par plus de parties égales ». D’autre part, l’existence de deux sortes de quantités, dites discontinues et continues, est à l’origine des disciplines mathématiques bien séparées que sont l’arithmétique (les nombres) et la géométrie (les grandeurs).
Ces principes mathématiques, fondés sur des arguments philosophiques portant sur le caractère essentiel et indivisible de l’unité naturelle, vont rester opérationnels en Occident jusqu'au XVI° siècle. Le mathématicien Simon Stévin (1548-1620) est le premier à remettre en question ces concepts de façon radicale. Il affirme que le nombre inclut toutes les quantités, qu'elles soient continues ou discontinues. Ce faisant, il crée les bases de l’arithmétique moderne nécessaire au développement scientifique tout en ruinant une représentation de l’être, de sa forme et de ses mesures restée sans grand changement depuis l’époque gréco-latine.


Frise de grecques et de volutes. Ces schémas de construction,
issues de l'antiquité, seront encore employés pour le dessin
de la volute des instruments de musique (traité de Lutherie pp 217-220).

Au moment où Stévin énonce ses théories, les artisans utilisent encore les outils mathématiques hérités de l’Antiquité. Les mesures d’un objet résultent d’une suite de relations établies à partir d’une dimension de référence extraite de l'objet lui-même.